Résumé : |
Comment implanter le modèle du rétablissement dans un contexte de réduction des risques ? Illustration avec le cheminement de la Fondation du levant, qui accueille des usagers au parcours chaotique, avec comorbidités addictologiques, psychiatriques et somatiques.
La fragmentation et les logiques parfois divergentes entre services de santé mentale et d’addictologie perdurent, en lien avec des obstacles historiques, politiques, idéologiques, professionnels, structurels et pratiques (Davidson et White, 2007).
Adopter une perspective de rétablissement permet de favoriser une approche intégrée, cohérente avec les témoignages des personnes concernées par des troubles concomitants (Davidson et al., 2008). Si les dimensions de bien-être et de qualité de vie s’invitent de plus en plus dans les politiques de santé publique, ces indicateurs sont encore peu considérés dans la recherche. Ces derniers se limitent le plus souvent au rétablissement clinique, non superposable bien que complémentaire à la notion de rétablissement personnel (Franck, 2017). C’est paradoxalement en addictologie que la confusion semble la plus grande, alors même qu’historiquement, c’est au sein du mouvement des Alcooliques anonymes que le terme de rétablissement apparaît pour la première fois (Galanter, 2014). Si, à l’époque, le rôle des pairs et la spiritualité sont déjà identifiés comme essentiels à la transformation de l’identité intrinsèquement liée au rétablissement personnel, l’abstinence est alors une condition sine qua non pour y parvenir. Le surgissement du Sida et de « scènes ouvertes » de consommation de drogues (1) ont contraint les professionnels à étendre leurs champs de compétences et d’actions vers la prévention et la réduction des risques, élargissant par là même la possibilité de se rétablir, non plus uniquement par l’abstinence, mais aussi par une consommation contrôlée (Laudet et Hill, 2015). Dans les addictions, le rétablissement s’entend désormais comme «un processus de changement par lequel les personnes améliorent leur santé et leur bien-être, mènent une vie autonome et s’efforcent d’atteindre leur plein potentiel» (Samhsa, 2024). Bien que similaire à la définition en santé mentale, trois ingrédients spécifiques semblent néanmoins incontournables pour se rétablir d’une addiction (Witbrodt et al., 2014). [...]
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